Fracture

Fracture

Points importants :

  • Ne pas refroidir l’articulation en cas de fracture ouverte en attendant l’arrivée des secours 
  • Critères d’Ottawa pour évaluer fracture avant de faire une radiographie 
  • Évaluer la syndesmose 

Généralités : 

Les fractures de cheville, survenant pour la plupart du temps suite à des tacles ou chocs brutaux, nécessitent un traitement d’urgence et une réduction la plus rapide possible si cette dernière est disloquée. Cette réduction est cruciale pour prévenir l’hypo-perfusion et/ou des lésions nerveuses. L’hématome de la plaie et la nécrose du bord de la plaie sont les complications les plus courantes et le taux d’infection postopératoire est de 2 %. Jusqu’à 10% des patients développent une arthrose de la cheville à moyen ou long terme (1).

Il semble également primordial de jeter un œil à la syndesmose lors de la prise en charge pour la reconstruction anatomique optimale de l’articulation. En effet, une lésion syndesmotique se produit dans environ 50 % des fractures de type Weber B et dans la totalité des fractures de type Weber C (4).

Anatomiquement, la cheville c’est quoi ?

L’articulation talo-crurale (cheville) est la jonction de trois structures osseuses : les extrémités distales du tibia et du péroné (fibula) et la trochlée de l’astragale (talus). 

Le tibia et le péroné sont liés élastiquement dans la fourche de l’articulation de la cheville via les structures ligamentaires de la syndesmose (membrane interosseuse, ligaments tibiofibulaires antérieur, postérieur et transversal) (5)(2). 

De puissants ligaments collatéraux (3 faisceaux) stabilisent l’articulation contre les contraintes latérales. Médialement, on retrouve 2 faisceaux principaux. 

Comment en faire le diagnostic ?

Dans un premier temps, il est primordial de connaitre le mécanisme lésionnel et de contextualiser ce qu’il s’est passé. Pour certains scientifiques, il est difficile de distinguer de manière fiable une fracture de la cheville d’une lésion ligamentaire sur la base du seul examen physique initial. Les constatations permettent seulement une orientation plus précise avant d’ensuite réaliser un examen radiographique. 

Les indices d’une fracture probable de la cheville sont : un gonflement, un hématome, une sensibilité à la pression sur la malléole interne et/ou externe ou sur la tête proximale du péroné (fracture haute du péroné, dite blessure de Maisonneuve). En outre, il convient d’exclure toute autre lésion osseuse associée en palpant l’astragale (talus), le calcanéum, l’os naviculaire, l’articulation médio-tarsienne (Chopart) et la base du cinquième métatarsien à la recherche d’une éventuelle crépitation ou sensibilité locale. 

Comme pour toutes les fractures luxées, une malposition de l’articulation flagrante est une indication pour une réduction immédiate. Cette dernière s’effectue avec une traction axiale manuelle sous analgésie adéquate, suivie d’un maintien de l’articulation dans une attelle (6).

Les critères à appliquer directement pour orienter ou réfuter le diagnostic de fracture repose sur les critères d’Ottawa. 

  • Impossibilité d’effectuer 4 pas, directement après le traumatisme ou lors de l’examen
  • Douleurs dans les 6 centimètres inférieurs de la malléole interne ou externe
  • Douleur à la base du 5ème métatarse (processus styloïde) 
  • Douleur au niveau de l’os naviculaire 

A l’arrivée aux urgences, l’examen radiographique objectivera le pré-diagnostic déjà réalisé. Trois radiographies (antérieure-postérieure, latérale et de mortaise) sont nécessaires pour évaluer l’état osseux et articulaire de la cheville (7). Weber établit 3 catégories de fractures qui sont définies dans la littérature en fonction de la position du trait de fracture par rapport à la syndesmose :  

  • Type A : Sous-ligamentaire (en dessous de la syndesmose)
  • Type B : Inter-ligamentaire (au niveau de la syndesmose)
  • Type C : Sus-ligamentaire (au-dessus de la syndesmose)

Quel traitement appliquer ?

Sur le terrain, une inspection immédiate du membre inférieur déshabillé doit s’effectuer par le staff médical ou les secours. L’inspection des tissus mous concerne leur état de perfusion et éventuellement une détection de lésions nerveuses importantes. En cas de malposition évidente du membre, une réduction immédiate sous antidouleurs est primordiale afin d’éviter toute nécrose ou retard d’opération par la suite.  Un autre geste également important, le refroidissement de l’articulation doit être entrepris avec précaution, voire pas du tout en cas de fracture ouverte, pour éviter de blesser les tissus mous par le froid (cela pourrait affecter les nerfs, la peau ou entrainer une atrophie des muscles considérés) (8).

La décision ensuite d’opérer ou non dépend du type de fracture (arrachements osseux, disloquée, ouverte…) mais également du chirurgien et de ses habitudes. Les objectifs de la chirurgie sont toujours la reconstruction anatomique lisse de la surface articulaire et la protection des structures ligamentaires lésées pour permettre une thérapie fonctionnelle postopératoire précoce de l’articulation (1). Les fractures isolées instables de la malléole latérale et les fractures bi et trimalléolaires sont généralement toujours traitées par fixation interne. Le traitement conservateur des fractures instables de la cheville entraîne une diminution de la fonction à court terme et le développement de l’arthrose à long terme (10).

Après avis du médecin, une période d’immobilisation est requise durant plusieurs semaines. En principe, toute fracture stable avec des fragments non déplacés ou faiblement déplacés peut être traitée de manière conservatrice. Ces lésions sont désormais préférentiellement immobilisées via attelles ou bottes de marche afin d’assurer une fonction précoce associée à une mise en charge complète adaptée à la douleur. Il est important également de garder cette immobilisation la nuit et d’utiliser les béquilles pour se déplacer jusqu’à avoir l’avis du médecin ou du kinésithérapeute, puisque s’en séparer trop vite pourrait induire des compensations lors de la marche, des dérèglements posturaux mais également ralentir le processus de cicatrisation. Au fur-et-à-mesure, ces dernières permettront la pose de l’appui lors de la marche, qui se doit d’être rapidement effectué tout en gardant en tête les sensations du patient. Si le patient ne peut pas mettre tout son poids sur la cheville en raison du type de fracture ou de la douleur, l’administration d’un médicament antithrombotique pendant cette période doit être envisagée, pour éviter la formation d’un caillot sanguin (9).

Botte de marche

Comment se passe ensuite la rééducation ?

Il est primordial d’effectuer une rééducation avec un kinésithérapeute après le retrait de l’attelle ou de la botte de marche. En effet, une prise en charge précoce permet une diminution du risque de complications mais surtout une récupération fonctionnelle, musculaire et trophique beaucoup plus rapide. Chez les patients en bon état physiologique et sans comorbidités, l’objectif est de restaurer l’anatomie pré-lésionnelle avec précision pour obtenir la meilleure fonction possible et éviter le développement de l’arthrose (3). L’objectif sera ainsi de retourner sur le terrain le plus rapidement possible. 

Lors du traitement, il est important de récupérer le plus rapidement possible des amplitudes de mouvements correctes, qui sont naturellement réduites après une immobilisation de plusieurs semaines. Il faut également renforcer les muscles stabilisateurs de la cheville (long et court fibulaire, tibial postérieur…) mais surtout effectuer un gros travail de proprioception. Il est intéressant d’inclure au maximum des exercices en lien avec la pratique sportive du patient, tandis que la reprise de course se fait de manière très progressive et en respectant le seuil de douleur. 

Avec toutes ces informations, comment peut-on prévenir les fractures de cheville ?

La prévention des fractures dans le football ne peut empêcher ou diminuer considérablement le risque de blessures, puisque ces dernières surviennent la plupart du temps suite à des tacles ou coups brutaux. Elles proviennent de contraintes extérieures violentes pour l’organisme, dépassant sa capacité de résistance normale. Cependant, quelques pistes sont à creuser pour diminuer l’incidence de ce type lésionnel. En effet, une alimentation suffisante en calories, protéines et surtout calcium permettrait d’augmenter la solidité du tissu osseux. La prévention des fractures hors contact extérieur peut quant à elle se faire sur un travail d’appuis variés, avec un bon contrôle moteur du membre inférieur pour être capable de faire face à diverses contraintes de réceptions. Comme évoqué plus haut, le renforcement des muscles stabilisateurs de la cheville est également à prendre en considération.

Ces pistes de réflexion demandent à être étudiées de plus près. Néanmoins il parait toujours très complexe de baser des études sur des faits isolés comme les tacles violents et d’étudier statistiquement les effets d’influences nutritionnelles ou d’entrainement variés sur des contraintes d’intensités différentes. 

Références :

1.         Goost H, Wimmer MD, Barg A, Kabir K, Valderrabano V, Burger C. Fractures of the ankle joint: investigation and treatment options. Dtsch Arzteblatt Int. 23 mai 2014;111(21):377‑88. 

2.         Hermans JJ, Beumer A, de Jong TAW, Kleinrensink GJ. Anatomy of the distal tibiofibular syndesmosis in adults: a pictorial essay with a multimodality approach. J Anat. déc 2010;217(6):633‑45. 

3.         Tengberg PT, Ban I. [Treatment of ankle fractures]. Ugeskr Laeger. 8 oct 2018;180(41):V11170883. 

4.         Hermans JJ, Beumer A, de Jong TAW, Kleinrensink GJ. Anatomy of the distal tibiofibular syndesmosis in adults: a pictorial essay with a multimodality approach. J Anat. déc 2010;217(6):633‑45. 

5.         Kannus P, Palvanen M, Niemi S, Parkkari J, Järvinen M. Increasing number and incidence of low-trauma ankle fractures in elderly people: Finnish statistics during 1970-2000 and projections for the future. Bone. sept 2002;31(3):430‑3. 

6.         Shearman A, Sarraf KM, Thevendran G, Houlihan-Burne D. Clinical assessment of adult ankle fractures. Br J Hosp Med Lond Engl 2005. mars 2013;74(3):C37-40. 

7.         Brandser EA, Berbaum KS, Dorfman DD, Braksiek RJ, El-Khoury GY, Saltzman CL, et al. Contribution of individual projections alone and in combination for radiographic detection of ankle fractures. AJR Am J Roentgenol. juin 2000;174(6):1691‑7. 

8.         Høiness PR, Hvaal K, Engebretsen L. Severe hypothermic injury to the foot and ankle caused by continuous cryocompression therapy. Knee Surg Sports Traumatol Arthrosc Off J ESSKA. 1998;6(4):253‑5. 

9.         Pelet S, Roger ME, Belzile EL, Bouchard M. The incidence of thromboembolic events in surgically treated ankle fracture. J Bone Joint Surg Am. 21 mars 2012;94(6):502‑6.

10.       Gougoulias N, Khanna A, Sakellariou A, Maffulli N. Supination-external rotation ankle fractures: stability a key issue. Clin Orthop. janv 2010;468(1):243‑51.