Kinésiotapes

Kinésiotapes

Les kinésiotapes, c’est quoi ? 

Les kinésiotapes (KT) représentent des bandes élastiques souples favorisant le mouvement (contrairement à d’autres contentions comme les straps ou autres…). Ces bandes sont posées par un kiné, ostéopathe ou médecin avant une activité physique ou une prise en charge médicale. Ils représentent une partie supplémentaire de la prévention, de la réhabilitation, de la thérapie par l’exercice et de l’optimisation des performances (1). Ces bandes de couleurs populaires reposent sur deux principes différents en fonction du sens de pose. En effet, elles peuvent jouer un rôle sur la perception de la douleur en utilisant la notion de « gate control », en diminuant le tonus musculaire et perturbant directement les voies nerveuses. Ou au contraire, en augmentant ce tonus musculaire et ainsi induire un recrutement musculaire plus conséquent. 

Quels effets physiologiques induisent-ils ? 

Une étude récente, celle de Wong et al (2),  a révélé que l’application du KT sur le vaste médial ne modifiait pas la génération du couple maximal, mais a raccourci le temps nécessaire pour générer ce couple maximal chez des participants sains. Le KT permettrait ainsi de produire une contraction musculaire plus précoce. Lors d’autres études, il a été mis en lumière que les Kinésiotape avaient augmenté la vitesse de la balle lors de frappes ou lancers, et que ces effets peuvent être expliqués grâce à une activation plus importante des capteurs cutanés et à un renforcement consécutif des afférences de la périphérie. Ces modifications ont augmenté le recrutement des unités motrices qui ont consécutivement augmenté le tonus musculaire (1).

Callaghan et al (3) ont quant à eux évoqué une amélioration de la proprioception au niveau du genou grâce à la pose de kinésiotapes. Pour justifier ces effets, les fabricants du KT expliquent que la bande provoque des micro-circonvolutions, ou plis, dans la peau, ce qui a pour effet de soulever la peau et de l’éloigner du tissu sous-jacent. Cela facilite le relâchement de la pression sur les tissus sensibles situés en dessous et offre un espace pour le mouvement des fluides sanguins et lymphatiques. On prétend que cela peut aider à soulager la douleur en déchargeant les tissus nerveux irritables (grâce à cette théorie du « gate control), à prévenir la sur-contraction, à faciliter le drainage lymphatique et à améliorer la position des articulations et la conscience kinesthésique. Selon son inventeur, la performance musculaire serait également optimisée grâce à une amélioration du système neuromusculaire, et tous ces effets participeraient ainsi à une diminution du risque de blessure lors d’entrainements ou de matchs réalisés avec ces bandes (4). 

Quelles indications principales ?

  • Pathologie musculaire ou aponévrotique : pour lutter contre l’augmentation du phénomène inflammatoire, augmenter la vascularisation et favoriser la cicatrisation, activer ou inhiber la réponse musculaire.
  • Pathologie articulaire : pour la stabilité, le confort, les sensations proprioceptives et diminuer les sensations douloureuses dues à l’arthrose ou autres conflits.
  • Problème lymphatique ou circulatoire : travail sur les œdèmes, hématomes, lymphœdèmes grâce à l’application de montages particuliers.
  • Diminution de la sensation de douleur : en lien avec une des problématiques citées ci-dessus.

Comment les poser ? 

Avant toute pose, il est important que la peau soit sèche voire dégraissée à l’aide d’un spray spécial. Il est également essentiel de connaitre l’anatomie, le trajet et l’action de chaque muscle afin d’optimiser la pose du KT. En effet, avant de poser la base de la bande élastique, il faut placer le muscle en position longue et étirée. La littérature varie dans les avis concernant la tension appliquée lors de la pose sur la peau, mais bien souvent il est préconisé d’y appliquer 25% d’étirement par rapport à son élasticité de base. 

En fonction de l’effet recherché, le sens de pose sera différent et contraire. Pour une activation du tonus musculaire, la tension sera appliquée de l’origine proximale du muscle jusqu’à son insertion distale. Tandis que pour une inhibiton, la tension sera appliquée de l’insertion distal jusqu’à l’origine proximale (5).

Exemple d’une pose de Kinesiotape pour les gastrocnémiens et le soléaire

Quelles contestations scientifiques ?

Malgré tous les effets évoqués précédemment, il n’existe pour le moment aucun consensus entre les scientifiques concernant les actions bien que des pistes de réflexion soient déjà bien avancées. Beaucoup d’études se sont attelées aux effets des kinésiotape mais sans pour autant être formelles, puisqu’elles sont souvent contradictoires et consacrées à un unique aspect (i.e., la force, la douleur ou la stabilité). 

Par exemple, Bagheri et al (6) ont étudié l’impact de ces bandes sur les muscles du mollet. La pose du kinesiotape respectait les modalités d’application « activatrice » (pour augmenter les performances musculaires) ou « inhibitrice » (pour diminuer au contraire l’activité musculaire et la douleur). Les résultats de leur étude ont mis en lumière une augmentation de l’activité EMG (activité électrique du muscle) pour la pose activatrice, et une diminution de cette activité sur la pose inhibitrice lors de contractions isométriques. Cependant, ils ont trouvé peu voire aucun effet sur des contractions dynamiques, ne pouvant ainsi pas justifier scientifiquement les effets des KT. D’autres auteurs comme Yoosefinejad et al (7) contredisent quant à eux les effets activateurs et inhibiteurs. 

De son côté, l’hypothèse selon laquelle l’activité musculaire serait améliorée via de meilleurs flux sanguins et lymphatique n’a pas non plus encore été démontrée. 

A noter également que le côté psychologique et placebo, qui est un outil important dans toutes prises en charge, pourrait également rentrer en jeu et perturber la validité physiologique des effets du kinésiotape. 

Quant à elles, les études sur l’effet des KT concernant les douleurs exposent des avis divergents. L’excitabilité des motoneurones est parfois remise en question, bien qu’une légère anesthésie soit dans la plupart des cas mise en lumière. 

Ainsi, bien que de nombreux avis divergent concernant les kinésiotapes, ils représentent tout de même un outil de plus dans la prise en charge des blessures, mais également dans la prévention de récidives en jouant sur l’activation musculaire, qu’importe l’intensité. Quand bien même ces effets seraient minimes ou résulteraient du psychologique, il ne faut surtout pas hésiter à continuer de les utiliser si les sportifs en retournent des avis positifs. Ainsi, bien que les KT ne se reposent pas sur un soutien infaillible de la littérature quant à ses effets, chacun se doit de construire son propre avis avec du recul et son expérience pratique, cette dernière reste toujours plus importante que des études théoriques. 

Références :

1.         Müller C, Brandes M. Effect of Kinesiotape Applications on Ball Velocity and Accuracy in Amateur Soccer and Handball. J Hum Kinet. 22 déc 2015;49:119‑29. 

2.         Wong OMH, Cheung RTH, Li RCT. Isokinetic knee function in healthy subjects with and without Kinesio taping. Phys Ther Sport Off J Assoc Chart Physiother Sports Med. nov 2012;13(4):255‑8. 

3.         Callaghan MJ, Selfe J, Bagley PJ, Oldham JA. The Effects of Patellar Taping on Knee Joint Proprioception. J Athl Train. mars 2002;37(1):19‑24. 

4.         Kneeshaw D. Shoulder taping in the clinical setting. J Bodyw Mov Ther. janv 2002;6(1):2‑8. 

5.         Lee H, Lim H. Effects of Double-Taped Kinesio Taping on Pain and Functional Performance due to Muscle Fatigue in Young Males: A Randomized Controlled Trial. Int J Environ Res Public Health. 31 mars 2020;17(7):E2364. 

6.         Bagheri R, Pourahmadi MR, Sarmadi AR, Takamjani IE, Torkaman G, Fazeli SH. What is the effect and mechanism of kinesiology tape on muscle activity? J Bodyw Mov Ther. avr 2018;22(2):266‑75. 

7.         Yoosefinejad AK, Motealleh A, Abbasalipur S, Shahroei M, Sobhani S. Can inhibitory and facilitatory kinesiotaping techniques affect motor neuron excitability? A randomized cross-over trial. J Bodyw Mov Ther. avr 2017;21(2):234‑9.