La cryothérapie
La thérapie par le froid, remontant à l’Antiquité, peut être utilisée de manière localisée ou alors plus globale avec une immersion complète. Traditionnellement, la glace est utilisée dans le traitement des blessures musculo-squelettiques pour son côté antalgique, tandis que l’immersion dans l’eau froide et l’exposition du corps entier au froid sont utilisées pour la récupération après un exercice. La cryothérapie possède ainsi de nombreux avantages concernant la récupération, validés pour la plupart dans la littérature. Cependant, il est indispensable d’en faire bon usage afin d’éviter d’induire des effets plutôt négatifs.
Physiologiquement, il se passe quoi ?
Brièvement, concernant la douleur, la cryothérapie peut induire des effets analgésiques en inhibant la vitesse de conduction nerveuse et en limitant la formation d’œdèmes après une lésion. C’est pour cela qu’elle est traditionnellement utilisée en cas de chocs ou traumatismes.
A propos de la récupération, elle facilite la régénération tissulaire et diminue propagation de la réponse inflammatoire après les lésions musculaires de l’effort (1). Cette diminution de propagation s’expliquerait par une réduction de la perfusion musculaire qui préserverait l’approvisionnement en oxygène cellulaire, limitant ainsi la mort cellulaire hypoxique. Cependant, certains chercheurs ont indiqué qu’à une température comprise entre 8 et 15°C, le corps réagissait via la production de frissons qui eux-mêmes augmenteraient la perfusion de la musculature profonde. Ainsi, les auteurs ont suggéré qu’une température de traitement moins froide empêcherait la réponse de frissons et l’augmentation de la perfusion des tissus profonds. Dans ces conditions de température, la cryothérapie serait alors une option plus efficace dans le processus de récupération des blessures des tissus mous ou de l’exercice (2). De plus, il est démontré qu’une exposition du corps à l’air très froid (entre -110 et -140°) semble apporter des effets au moins subjectifs au sportif sur une diminution de la douleur. D’autres part, il peut y avoir de réels effets physiologiques qui restent cependant contestés. Les avis restent mitigés mais la littérature aurait tendance à approuver cette méthode pour casser les processus trop inflammatoires en post-effort direct.
Quelles modalités d’utilisation ?
La cryothérapie est indiquée lorsqu’une récupération rapide est nécessaire entre les séances d’exercice, plutôt qu’après un entraînement de routine (2). Idéalement, il est ainsi préconisé d’utiliser ces techniques après un match ou un entrainement plus intensif que d’habitude, il semblerait tout de même qu’elles puissent ralentir les processus physiologiques de développement musculaire et/ou métabolique (3). En effet, des preuves suggèrent que l’utilisation répétée de la cryothérapie atténue les gains de force après un entraînement en résistance (4)(5)(6). Les chercheurs se sont également interrogés sur le moment d’application optimal de la cryothérapie pour la récupération. Il s’avère que l’immersion dans l’eau froide après l’exercice est plus efficace que la récupération passive (7).
D’autre part, l’étude de Brophy-Williams et al (8), a pu mettre en évidence une efficacité plus intéressante d’une immersion immédiate comparée à une immersion retardée à 3 heures après une séance d’exercice à haute intensité. Cette utilisation serait plus bénéfique pour les performances de course, de saut ou d’autres efforts le lendemain et/ou le surlendemain. Une méta-analyse récente a conclu qu’après un exercice, la cryothérapie appliquée localement n’accélère pas la force de récupération (9). Étant donné que la glace appliquée est généralement limitée à 30 min, il est peu probable qu’une seule application sur une petite surface fournisse un stimulus de refroidissement suffisant pour récuperer. Afin d’obtenir des effets plus systémiques au profond, il est ainsi recommandé d’utiliser les bains froids et d’immerger plus globalement le corps (les 2 membres inférieurs, avec ou sans le tronc ou les bras…). Concernant la récupération, l’objectif principal de la cryothérapie devrait ainsi être de maintenir une température intramusculaire refroidie aussi longtemps que possible dans les phases suivant un exercice physique, afin d’empêcher la prolifération de dommages secondaires (2). Concernant la durée, des effets significatifs ont été rapportés pour une immersion globale à 15° durant une quinzaine de minutes. Cette durée permet d’obtenir des résultats sur le flux veineux en réduisant ce dernier vers les jambes et l’abdomen pour le rediriger de la périphérie vers le cœur. Permettant ainsi une amélioration du retour veineux et l’efficacité cardiaque (10).
Sur le plan des blessures aigues, une tendance croissante dans la littérature recommande de ne pas glacer les blessures afin de ne pas émousser la réponse naturelle de guérison, du moins pas durant les 2 premiers jours (11). L’application localisée de froid pourrait diminuer le temps de cicatrisation et la réponse inflammatoire qui est essentielle dans un processus de guérison. Cependant, ces affirmations sont à nuancer car le côté antalgique du froid apporte également des bénéfices importants, l’idéal serait ainsi de mettre du froid mais pas à une température trop basse afin de trouver le juste milieu (aux alentours d’une petite dizaine de degrés).
Que doit on retenir à propos de la cryothérapie ?
La cryothérapie est une modalité approuvée par la littérature concernant la récupération physiologique. Cependant, il est important de l’appliquer préférentiellement après les matchs et efforts importants. En effet, si on l’utilise après des séances ayant pour but une amélioration des capacités physiques, la cryothérapie limiterait les adaptations du métabolisme. Il est également important de l’appliquer immédiatement après les efforts et de manière globale, si possible à l’aide de bains froids, afin d’avoir des effets systémiques plus importants. L’idéal est de tenir entre 10 et 15 minutes dans une eau aux environs de 15° également. Pour ce qui est de la cryothérapie à air froid, les modalités sont à voir avec les spécialistes mais elles reposent sur les mêmes effets physiologiques, à savoir une diminution globale de la température corporelle, améliorant la récupération.
Références :
1. Järvinen TAH, Järvinen TLN, Kääriäinen M, Kalimo H, Järvinen M. Muscle Injuries: Biology and Treatment. Am J Sports Med. mai 2005;33(5):745‑64.
2. Kwiecien SY, McHugh MP. The cold truth: the role of cryotherapy in the treatment of injury and recovery from exercise. Eur J Appl Physiol. août 2021;121(8):2125‑42.
3. Ihsan M, Watson G, Lipski M, Abbiss CR. Influence of postexercise cooling on muscle oxygenation and blood volume changes. Med Sci Sports Exerc. mai 2013;45(5):876‑82.
4. Yamane M, Ohnishi N, Matsumoto T. Does Regular Post-exercise Cold Application Attenuate Trained Muscle Adaptation? Int J Sports Med. 11 mars 2015;36(08):647‑53.
5. Hyldahl RD, Chen TC, Nosaka K. Mechanisms and Mediators of the Skeletal Muscle Repeated Bout Effect. Exerc Sport Sci Rev. janv 2017;45(1):24‑33.
6. Peake JM, Roberts LA, Figueiredo VC, Egner I, Krog S, Aas SN, et al. The effects of cold water immersion and active recovery on inflammation and cell stress responses in human skeletal muscle after resistance exercise: Effects of post-exercise treatments on inflammation in human muscle. J Physiol. 1 févr 2017;595(3):695‑711.
7. Nédélec M, McCall A, Carling C, Legall F, Berthoin S, Dupont G. Recovery in soccer : part ii-recovery strategies. Sports Med Auckl NZ. janv 2013;43(1):9‑22.
8. Brophy-Williams N, Landers G, Wallman K. Effect of immediate and delayed cold water immersion after a high intensity exercise session on subsequent run performance. J Sports Sci Med. 2011;10(4):665‑70.
9. Nogueira NM, Felappi CJ, Lima CS, Medeiros DM. Effects of local cryotherapy for recovery of delayed onset muscle soreness and strength following exercise-induced muscle damage: systematic review and meta-analysis. Sport Sci Health. mars 2020;16(1):1‑11.
10. Vaile J, O’Hagan C, Stefanovic B, Walker M, Gill N, Askew CD. Effect of cold water immersion on repeated cycling performance and limb blood flow. Br J Sports Med. août 2011;45(10):825‑9.
11. Takagi R, Fujita N, Arakawa T, Kawada S, Ishii N, Miki A. Influence of icing on muscle regeneration after crush injury to skeletal muscles in rats. J Appl Physiol. févr 2011;110(2):382‑8.